Simone Guhl-Bonvin

Extrait d'un entretien publié par Le Nouvelliste
(Jean-Marc Theytaz - 6 février 2009) à l'occasion de l'exposition de ses œuvres à la Grande-Fontaine à Sion pour ses cinquante ans de peinture de Simone Guhl-Bonvin.

Comment et quand avez-vous senti que la vocation d'artiste peintre vous habitait? Etait-il possible pour une femme artiste de suivre un cursus académique normal dans l'époque d'après-guerre?
Dans les annés 1945-1955, le milieu artistique valaisan était agréable, l'ambiance y était positive et il n'y avait pas de rivalités prononcées entre les artistes. Pour ma part, j'ai effectué ma formation à Bâle, Lausanne et Paris et après je suis venue m'installer à Sion où j'ai travaillé dans le même atelier que Simone de Quay et Germaine Luyet. Nous entretenions avec les artistes de l'époque, les Chavaz, Moro... d'excellentes relations... Louis Moret apportait pour sa part une impulsion formidable à la création artistique cantonale et Albert de Wolfforganisait régulièrement des expositions de peintres valaisans à la Grange-à-l'Evêque, ce qui générait une grande motivation pour la création artistique.

Vous avez vécu la guerre des Anciens et des Modernes, qui mettait en scène les tenants de la figuration et ceux, plus avant-gardistes, de l'abstraction: comment avez-vous vécu cette confrontation et en quoi vous a-t-elle concernée, vous a-t-elle forgée dans vos convictions et vos choix artistiques?
Pour ma part, je travaille entre figuration et abstraction, dans une figuration qui est une sorte de transposition: pour les paysages de Mongolie ou du Maroc par exemple, il ne s'agit pas de description typique de ces pays, de quelque chose qui a trait au folklorique,

mais de traduire ces grands espaces en un langage de géométries, de compositions, de constructions architecturales, de structures et de couleurs que j'affectionne beaucoup. En fait cela pourrait être n'importe où, en fait mes voyages me donnent une impulsion première, un moteur initial. Dans ma peinture on trouve peu de personnages, parfois quand même quand je m'attaque à des pièces de théâtre que met en scène ma fille Geneviève: il s'agit là de compositions graphiques réalisées à partir d'un spectacle.

Votre longue carrière vous a permis de traverser des périodes charnières, notamment celles qui ont vu se succéder les directeurs del'Ecole cantonale des beaux-arts du Valais, de De Wolff, Fred Fay... à Harald Schulthess ou Walter Fischer; il y a également eu la fameuse exposition «Repères» à Martigny, qui a créé une remise en cause des valeurs et normes artistiques valaisannes traditionnelles. Comment avez-vous vécu ces étapes de l'histoire de l'art en Valais?
Je n'ai pas été particulièrement touchée par ces évolutions, suivant toujours mon propre itinéraire avec passion, motivation, énergie. Je fais partie de Visarte et ai vécu les belles périodes avec Pierre Loye, Michel Favre, Chervaz... les échanges avec une expo à Prague qui était formidable, par exemple. Aujourd'hui je trouve l'association un peu éclatée, dispersée, sans véritable «noyau dur»...

Quelle est la thématique de cette exposition à la Grande-Fontaine, quelles sont les articulations principales de votre langage pictural actuel?
Je n'ai pas de thématique particulière. J'axe ma recherche sur la composition et la couleur; c'est aussi l'inconscient qui s'exprime parfois, qui révèle des visions enfouies par des jeux de transparences et des constructions de couleurs. Par ailleurs je me sens plus libre dans les grands formats et utilise toujours l'acryl que je vernis, ce qui pourrait laisser croire qu'il s'agit d'une technique à l'huile.

Quid de l'art contemporain?
Je me sens proche de gens comme Soulages, Bacon, Kiefer... mais éprouve peu d'accointances avec l'art contemporain proprement dit, art conceptuel et autres genres plus particuliers.